Pour les fêtes de fin d’année ou pour une grande occasion le champagne est de la partie. Mais le problème est toujours le même lorsque l’on se retrouve devant le linéaire du supermarché — certainement parce que vous avez décidé à tort de ne pas aller chez un caviste — Lequel choisir ?

Devant autant de possibilités et des abréviations et mots qu’on ne comprend pas toujours, on a souvent l’impression de sombrer dans l’inconnu et on choisit par hasard une bouteille de milieu de gamme. Ce billet va vous permettre de vous familiariser et dompter le champagne. Vous pourrez alors faire un véritable choix selon vos envies, goûts et mets. N’oublions pas le billet intitulé « Servir un champagne au dessert est une mauvaise idée » pour connaître le meilleur moment pour sortir votre plus belle bouteille à vos invités.

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Les intervenants dans la conception du Champagne

Il y a une chose qui me surprend toujours avec le champagne : il est l’unique vin d’Appellation d’Origine Contrôlée — AOC — qui n’a pas besoin de faire apparaitre cette appellation sur l’étiquette de la bouteille. Par contre, les champenois ont l’obligation d’indiquer la raison sociale et le nom de la commune où est situé le siège social de l’élaborateur [1] — il ne s’agit pas forcément du vigneron comme nous allons le voir —. L’élaborateur peut être l’entreprise qui effectue la prise de mousse ou voire même seulement le dégorgement. — une étape de la production de champagne qui consiste à enlever le dépôt concentré volontairement dans le goulot de la bouteille avant de la reboucher —.

Le Comité Interprofessionnel des Vins de Champagne — CIVB — décerne à chaque marque deux initiales [2] définissant le statut de l’embouteilleur :

  • RM pour Récoltant-Manipulant désigne le vigneron qui fait tout lui-même de la culture des vignes à l’élaboration du champagne. Le champagne est alors embouteillé sous son propre nom ou marque. Attention cependant ! Le vigneron peut obtenir le sigle RM et vinifier son raisin à la coopérative. Le champagne en réalité peut donc provenir de différents terroirs.

  • RC pour Récoltant-coopérateur désigne le viticulteur après avoir confié ses raisins à la coopérative pour les vinifier, les récupère après la seconde fermentation en bouteille. Comme pour le sigle RM, il commercialise son vin en son nom ou marque.

  • NM pour Négociant-manipulant désigne un négociant qui achète aux vignerons du raisin pour les vinifier et élaborer son propre champagne.

  • CM pour Coopérative de manipulation désigne une coopérative où les vignerons apportent le raisin. La cave coopérative se charge alors de la presse, la vinification puis de l’assemblage, à laquelle les adhérents apportent leurs raisins. Elle se charge de les presser, de les vinifier puis d’élaborer les assemblages. Le champagne peut alors être vendu soit sous le nom de la coopérative ou sa marque, soit sous le nom ou la marque du vigneron. Si le vigneron décide de vendre le champagne de lui-même, le sigle RC pourra alors apparaître sur la bouteille.

  • SR pour Société de récoltants désigne un regroupement de producteurs qui commercialisent sous une marque commune.

  • MA pour Marque d’acheteur désigne une marque de détaillant qui vend un champagne qu’il n’a pas élaboré. Ce sigle peut aussi désigner la marque secondaire d’un négociant manipulant — sigle NM — qui vend un champagne pour une marque distributeur. Cela peut aussi désigner la marque d’un négociant qui distribue le champagne produit par un autre vigneron ou négociant.

Les différents types de Champagne

La notion de cru désigne un terroir ou région de production dont est issu le vin ou champagne.

Le Champagne Brut sans année (BSA) [3]

Le Brut sans année est un champagne produit à partir de cépages provenant de régions différentes et sur différentes années. L’avantage de cette méthode est de maintenir la typicité de la marque dans le temps. Vous avez déjà dégusté un BSA l’an passé que vous avez apprécié ? Celui de cette année va vous plaire. Bien souvent, le dosage joue le rôle de signature de marque, c’est-à-dire l’ajout d’une petite quantité de liqueur permettant d’obtenir un vin allant de brut à doux. En règle général, ce champagne se compose de trois cépages en quantité plus ou moins équivalente : le Chardonnay, le Pinot Noir et le Pinot Meunier, avant d’être élevé pendant 18 mois.

Le Champagne millésimé

Comme son nom l’indique, ce champagne est fait exclusivement à partir de raisin d’une même année. Il peut être un mélange de cépages et de régions comme précédemment. Cependant, celui-ci est élevé pendant 3 ans. Ce type de champagne est sujet à de grandes variations en fonction des années. Certaines marques millésiment leur champagne uniquement pour les bonnes années.

Le Champagne Grand cru

Ce champagne est produit uniquement dans les communes classées à 100 %. Cela correspond à la crème de la crème du terroir champenois.

Le Champagne Premier cru

Ce champagne est produit dans les communes classées entre 90 et 99 % — ce qui est déjà super —.

Les mentions comme Cuvée spéciale ou Grande réserve (et autres) [4]

Là, nous entrons dans le monde merveilleux du marketing champenois. Ces mentions non réglementaires peuvent dire tout et n’importe quoi.

Blanc de blancs

Ce champagne a la particularité d’être élaboré uniquement et exclusivement avec des cépages blancs dont le plus connu et utilisé est bien entendu le Chardonnay — un raisin blanc à jus blanc —. Ce type de champagne est plus fin avec des arômes plus subtils.

Pour savoir plus sur le Champagne Blanc de Blancs : « Le Champagne Blanc de Blanc n’existe pas ! »

Blanc de noirs [5]

Je vous le donne en mille, ce champagne est produit uniquement et exclusivement à partir de cépages noirs à jus blancs, soit les deux restants, le Pinot Noir et le Pinot Meunier. Ce champagne a tendance à être plus charpenté que son petit frère le Blanc de Blancs.

Champagne rosé

Le champagne rosé peut s’obtenir de deux manières différentes. La première méthode est d’ajouter à un champagne ordinaire du vin rouge. La seconde méthode est de laisser macérer un moment les peaux des deux Pinots pendant la vinification pour colorer naturellement le Champagne.

Brut, sec ou demi-sec

Clairement, la majorité des champagnes commercialisés ce jour sont bruts. Le dosage de sucre permet de définir si le Champagne est brut, sec ou demi-sec.

  • brut nature, pas dosé ou dosage zéro moins de 3 grammes de sucre par litre
  • extra brut entre 0 et 6 grammes de sucre par litre
  • brut moins de 12 grammes de sucre par litre
  • extra dry entre 12 et 17 grammes de sucre par litre
  • sec entre 17 et 32 grammes de sucre par litre
  • demi-sec entre 32 et 50 grammes de sucre par litre
  • doux plus de 50 grammes de sucre par litre
Lire aussi -  Vin : découvrez le vignoble de Bordeaux

Les notions de terroirs et le vignoble champenois

Les terroirs

La marque est très importante en Champagne, c’est d’ailleurs l’une des seules régions à fonctionner de la sorte. La conséquence — bonne ou mauvaise — est que les producteurs essaient de maintenir à travers les années le goût du champagne qu’ils produisent. C’est super quand on a trouvé le vin qu’on apprécie le plus, c’est moins bien quand on considère que le risque premier de cette méthode est que les producteurs ont tendance à lisser le goût de leur champagne, effaçant par la même les différences des terroirs. De plus en plus de vignerons champenois prennent aujourd’hui la direction opposée pour créer des champagnes à leurs images en jouant sur le travail du sol, le vieillissement ou encore l’usage ou non de certaines levures.

La champagne recouvre plus de 33’000 hectares. On peut découpé la région en 4 grands ensembles assez hétérogènes qui donnent des profils aromatiques distincts.

  • La région la plus septentrionale — celle qui est le plus au nord — nommée la Montagne de Reims. Cette région est idéale pour le cépage Pinot Noir. Les meilleurs terroirs sont ceux orientés au sud et à l’est. Le champagne de cette région est un vin de caractère et corsé. ex. Bouzy ou Ambonnay.
  • Plus au sud, la vallée de la Marne. Cette région s’étend jusqu’aux portes de l’Île-de-France. Cette région présente une vraie diversité de terroirs avec les meilleurs crus situés à l’est. Le Pinot Noir et le Pinot Meunier sont très présents dans cette zone. ex. Mareuil ou Ay
  • Encore plus au sud, la Côte des Blancs. Son nom vous donne un bel indice sur le cépage de cette zone: le Chardonnay. Vous y trouverez des crus de renoms comme Chouilly, Cuis ou Cramant.
  • Enfin, tout au sud, le département de l’Aube. Cette zone est souvent considérée comme le vilain petit canard du Champagne. Pourtant la Côte des Bar produit des vins de caractère avec des arômes assez complexes et une bonne rondeur. Une toute petite zone se trouve en dessous, nommée Rose des Riceys que j’ai préféré rassembler avec la Côte de Bar puisque proposant sensiblement le même type de champagne. Bien que souvent mal-aimé, les grandes maisons de champagne de la Marne s’approvisionnent dans ces régions.
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Le vignoble de Champagne

Seulement 3 cépages sont autorisés en champagne, ils ont déjà été abordés plus haut, mais les revoici:

  • Chardonnay — un cépage blanc à jus blanc — qui représente 30 % de la surface d’encépagement, et surtout présent dans la côte des Blancs
  • Pinot Noir — un cépage noir à jus blanc — qui représente aussi 30 % de la surface et surtout présent dans la Côte de Bar et la Montagne de Reims
  • Pinot Meunier — un cépage noir à jus blanc — plus rustique et qui donne de bons résultats en cas d’année difficile.

Les étapes de la fabrication du Champagne

On doit le champagne à Pierre Pérignon, plus connu sous le nom de Dom Pérignon qui découvrit l’art de faire mousser le vin de champagne. La méthode champenoise, ou aussi appelée méthode traditionnelle comporte sept étapes clés pour concevoir le champagne.

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1. Le pressurage

Suite aux vendanges manuelles -puisque la vendange mécanique est interdite en champagne- des lots de 4’000 kg de raisins sont formés et pressés rapidement pour constituer trois résultats distincts. Le premier appelé « Cuvée » est constituée des 10 premières pièces de 205 l. Le « Marc » est pressé une seconde fois pour obtenir la « Première taille » de 410 l. Le marc est pressé une dernière fois pour obtenir la « Deuxième taille » de 205 l. Cette deuxième taille étant moins qualitative, elle est surtout destinée aux sous-marques.

2. La première fermentation

Les moûts — c’est-à-dire le jus de raisin pas encore fermenté — sont alors vinifiés comme un vin blanc classique et mis en cuves pendant plusieurs mois.

3. L’assemblage

Les vins alors obtenus sont goûtés et assemblés entre les différents cépages et millésimes avec des vins de millésimes antérieurs appelés « vins de réserve » pour obtenir les arômes souhaités par la marque.

4. Le tirage, appelé aussi la prise de mousse

Le printemps suivant la récolte, le vigneron procède à la « prise de mousse ». Ce tirage correspond à l’ajout dans la cuvée d’une liqueur de tirage. Cette liqueur est un mélange de vin, de levures et de sucre. Les levures ont pour but de transformer le sucre en alcool et de produire du gaz carbonique. Sans cela pas d’effervescence et pas de pression donc pas de champagne.

5. La seconde fermentation puis l’élevage sur lattes

La seconde fermentation s’effectue directement dans la bouteille. Elles sont conservées en cave à une température assez basse — 11 °C — entre 6 semaines à 2 mois. Les bouteilles sont alors mises sur lattes — c’est à dire à l’horizontale — pendant une période de minimum 15 mois pour les bruts non millésimés à minimum 3 ans pour les millésimés.

6. Le remuage puis le dégorgement

L’action des levures pendant la prise de mousse crée un dépôt dans la bouteille. Les bouteilles qui étaient conservées à l’horizontale sont alors mise la tête en bas. On dit alors qu’elles sont « mises sur pointes ». Elles sont régulièrement tournées de 1/4 de tour pour amener le dépôt dans le goulot de la bouteille. Cette étape dure en moyenne 6 semaines pour le remuage manuel et 1 semaine pour le remuage mécanique et est essentielle pour rendre le champagne limpide.

Après 1 an minimum et 3 ans pour les millésimés, les bouteilles sont dégorgées à basse température. Le goulot de la bouteille est plongé dans une solution à -27 °C pour former un glaçon de sédiments qui se sont formés à la seconde fermentation. La bouteille est alors débouchée pour faire sauter ce bouchon d’impuretés.

7. Le dosage

Nous sommes presque à la fin d’un long processus. Une liqueur de dosage — aussi appelée liqueur d’expédition — est ajoutée au champagne. Le plus souvent, cette liqueur est constituée de sucre de canne dissous dans du vin. La quantité de liqueur utilisée va jouer sur le type de champagne voulu : brut, sec, demi-sec.

Le champagne est alors prêt à être commercialisé et dégusté. Avec tout ça, vous ne direz plus que vous n’y connaissez rien et vous pourrez alors briller en société !

Jean-Nicolas Mouretin

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