Vous êtes-vous déjà demandé d’où provient le boisé du vin ? Il existe une relation étroite avec le fût… mais pas que. Découvrez en plus avec Beaux-Vins !
Depuis des milliers d’années, les fûts en bois sont le récipient de prédilection pour l’élevage et le transport du vin. Dans le monde du vin, on aime à dire que « le fût est l’épouse du vin ». Comme dans tout mariage, il est essentiel de bien choisir votre épouse. Sinon, vous avez de grandes chances de le regretter toute votre vie. C’est le cas pour la vie du vin et sa qualité. Le fût est le moyen de transport utilisé depuis que les Étrusques ont commencé à utiliser les barriques.
Le boisé : entre fermentation et maturation
Le fût de chêne peut intervenir dans deux étapes importantes de la vinification.
Lorsque l’on parle de « fermentation en fût de chêne », cela signifie que le jus de raisin non fermenté a été placé dans les fûts pour qu’il s’y transforme en vin. La fermentation en fût de chêne n’est faisable que pour les vins blancs pour une raison assez simple. Pour produire du vin rouge, le jus de raisin doit fermenter avec les peaux qui lui donnent sa couleur. Imaginez le temps que mettrait un vigneron a extraire du fût les peaux par le petit trou du fût.
Lorsque l’on utilise l’expression « élevé en fût de chêne », cela indique que le vin déjà fermenté a été versé dans les fûts pour y rester pendant sa maturation, allant de quelques mois à quelques années. La fermentation du vin rouge est souvent réalisée dans des cuves puis la maturation se fait dans les fûts, une fois que le jus a été débarrassé des peaux.
Le rôle du chêne dans les arômes boisés
La barrique joue un grand rôle dans la production du vin. En mettant en contacte le vin avec du bois, un véritable échange se produit. De l’oxygène pénètre et provoque une oxydation très douce du vin, ce qui assouplit les tanins. Il faut d’ailleurs régulièrement ajouter du vin dans la barrique pour compenser l’évaporation du vin et éviter un contact trop important entre le vin et l’air. Ce procédé s’appelle l’ouillage.
Le bois donne au vin des arômes, qu’il possède naturellement ou qu’il a acquis pendant la chauffe de la barrique. Après trois ans, le fût ne transmet presque plus d’arômes, voire plus du tout. L’élevage n’est cependant pas systématique. Les vins légers n’ont pas la structure pour le supporter et auraient tendance à perdre en souplesse et en fruité. De plus, cet élevage en fût de chêne est un coût important pour le vigneron.
Depuis quelques années, la mode est au vin sans arôme boisé. C’est pourquoi il existe le chêne neutre, sans transmission d’arômes. Vous commencez avec le vin, vous le faites, vous le fermentez et ensuite vous le mettez en fûts de chêne. Tous ces arômes additionnels sont ajoutés aux vins.
Sans trop rentrer dans le détail, le chêne français confère des arômes fumés, de vanille, de cannelle, de café, de clou de girofle, d’épices ou encore de miel au vin. Avec le chêne américain, vous aurez plutôt des arômes de vanille, de noix de coco et une certaine sucrosité.
« Le chêne américain, contre le chêne français, c’est l’exubérance contre l’élégance. »
Ce qui me déplaît parfois avec le boisé
Les vins au goût de vanille m’intéressent assez peu. La vanille n’est pas un goût naturel pour le raisin, ce n’est qu’un simple ajout. Cela revient à faire un cocktail plutôt que de faire un véritable vin. Lorsque je sens le goût ou les arômes du chêne dans mon verre, j’ai l’impression de rater le vin qui se cache derrière.
Avec les arômes apportés par le chêne, beaucoup d’erreurs et de défauts peuvent être camouflés poussant certains à abuser du chêne en se disant « bon, on a foiré quelque part alors balançons-leur une bombe de vanille et ça passera. ».
Il faut imaginer que le chêne est au vin ce que le sel est à un plat. Certains plats nécessitent un peu de sel. Mais, lorsque vous en mettez trop dans votre assiette, votre plat n’aura que le goût du sel. Il va masquer complètement votre nourriture. Il en va de même pour le chêne dans le vin et la véritable question à se poser est « quelle quantité de chêne est trop de chêne ? ».
Certains vins nécessitent d’avoir du chêne, lorsque d’autres non. Certains vins, provenant du cépage Cabernet par exemple, seraient trop austères sans les arômes du chêne pour l’amortir. Dans ce cas, les arômes apportés par le chêne sont essentiels.
Pour reprendre la comparaison avec le sel, la quantité d’arômes apportée par le chêne dépend de chacun. Personnellement, je trouve que le sel a tendance à dénaturer le goût du plat, tandis que d’autres vont jusqu’à en mettre dans la salade. Tout dépend des goûts et des habitudes de chacun.
Le boisé gênant : le jus de planche et ses copeaux
Aujourd’hui, beaucoup de choses commencent à changer dans le monde du vin. Quelques années auparavant, les vignerons faisaient du vin et le proposaient aux consommateurs. Désormais, les œnologues savent ce que le consommateur aime en fonction de son âge, de son sexe, de son pays. Le vin est transformé pour correspondre à une cible bien précise. Bien entendu, il est important que la viticulture s’adapte à son marché, mais cela peut mener à certaines dérives.
Influencé par le trop célèbre critique Robert Parker, les consultants en œnologie proposent aux vignerons qui n’ont pas les moyens de changer leurs tonneaux souvent de plonger des morceaux de chêne directement dans la barrique ou la cuve en inox. L’objectif est d’avoir un échange rapide entre le bois et le vin. Il existe plusieurs techniques pour obtenir un échange rapide entre le vin et le bois :
- les copeaux ou morceaux de bois : enfermés dans un sac alimentaire, ils sont plongés dans la cuve. La vitesse de diffusion des composés aromatiques dans le vin dépend de la taille des copeaux utilisés,
- les staves : un nombre de tronçons de bois est calculé pour une intensité de boisé souhaitée et ces staves sont directement plongés dans le vin.
Le boisé sans fût : un avantage économique
Il faut tout de même reconnaître un avantage à ces méthodes : les vignerons peuvent produire un vin boisé sans investir de grosses sommes dans des fûts régulièrement et donc proposer aux consommateurs un vin à un prix plus abordable.
L’aspect économique est le principal intérêt à l’utilisation des copeaux de bois. Une barrique neuve de chêne français coûte facilement plus de 560 € amortis sur 3 ans, soit un coût supérieur de 83 € par hectolitre. Le coût de l’utilisation des copeaux de chêne va de 0,15 à 13,30 € par hectolitre. Celui des tronçons ou morceaux de douelles va de 5 à 26 € par hectolitre.
Ces méthodes très développées depuis de nombreuses années dans les vins du Nouveau Monde ont fini par être acceptées dans la Communauté européenne depuis 2005 pour l’élevage et 2009 pour les vinifications. Malheureusement, ces méthodes donnent souvent des vins exubérants qui manquent de profondeur et de longueur. Ces vins, à qui on a forcé la main pour revêtir des arômes boisés, vont avoir beaucoup de mal à vieillir convenablement.
« Si le fût est l’épouse du vin, le copeau est son amante… »
Il faut bien conclure
L’utilisation des copeaux de bois dans le vin est encore chose tabou dans le monde du vin. Rarement, voire jamais indiqué sur les étiquettes, certains ne se gênent pas pour en abuser. Heureusement, comme dans n’importe quel mariage, d’autres se l’interdisent. L’appellation Saint-Chinian, par exemple, stipule noir sur blanc dans leur décret : « L’utilisation des morceaux de bois de chêne est interdite. » Les vins en biodynamie certifiés Demeter, ou les vins bios certifiés Nature et progrès en font de même. L’utilisation des copeaux de bois devrait se faire dans la plus grande transparence et une mention obligatoire devrait apparaître sur l’étiquette.
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si je puis me permettre je voudrais compléter ou corriger certains éléments de votre article.
Le “boisé” souvent décrié n’est qu’un aspect assez marginal de l’apport d’une barrique au vin.
La barrique, apporte 3 éléments principaux aux vins ou spirits :
– de l’oxygénation ménagée
– des tanins
– des arômes (3eme position)
l’oxygène est un des éléments les plus important. en fonction du choix du bois par son grain vous pouvez doser cet apport. un cépage naturellement oxydatif pourra tout a fait supporter une barrique si celle ci le protège de l’oxygène. C’est le rôle du tonnelier en accord avec le vinificateur d’identifier ce paramètre.
Les tanins : sans arômes notables les tanins sont présent pour renforcer la structure, la fraîcheur, et le fruité des vins. Vous pouvez donc avoir un élevage de vins sous bois sans le détecter. en revanche votre vin aura une tenue, une structure. les tanins sont également des antioxydants. (les vins de garde sont en très grande majorité boisés).
Les aromes : effectivement la mode du boisé fumé est désuète. elle a néanmoins été encensé pendant de nombreuses années par des journalistes et dégustateurs. une barrique peut être enrobante, vanilée, café, fumé ………
petit point à noter c’est que pour assister à de nombreuses dégustations les vins passés sous bois sont généralement mieux notés que ceux qui ne le sont pas.
les copeaux : ne les considérés pas comme un produit d’aromatisation. cela c’est fait pour certains marchés spécifiques mais cela est terminé depuis bien longtemps. le copeau permet surtout de corriger un vin d’arômes désagréables en le “nettoyant”. pour m’être plongé dans de la littérature ancienne à ce sujet, des moines du 18eme siècle préconisaient de passer des écourtures de chêne à la poêle à marron afin de les griller pour améliorer le vin… rien n’a été inventé récemment….
Le fruité et la fraicheur sont aujourd’hui plébiscités. les tonneliers ce sont adaptés à ces changements de goûts et d’attente de la clientèle.
aujourd’hui, vous dégustez certainement des vins boisés sans vous en rendre compte.
je tenais à apporter ces précisions qui me semblaient importantes.
a votre disposition pour échanger à ce sujet.
Merci pour ces précisions très justes ! En effet, il va me falloir réajuster cet article en fonction. 😉
il y a d’ailleurs un tableau des intrants bio très intéressant que j’ai découvert dernièrement sur la différence entre copeaux de bois et barriques/futs :
Utilisation du bois
Beaux-Vins
Tout dépend des goûts, moi le gout de vanille, s’il se marie bien avec le reste, me plait énormément, c’est d’ailleurs en goûtant un vin du haut médoc avec un gout de vanille en finale, que j’ai commencé à aimer et à boire du vin. Tout est relatif.
Moi je n’aime pas les vins sans bois, les vin modernes tournés sur le fruit (le Merlot est très à la mode) sont très bons mais très consensuels et sans réel caractère.